Preferimos el camping*
* Preferimos el camping (nous préférons le camping)
Cap sur San Pedro de Atacama, contrée touristique au Nord Est du Chili, qui vaut le détour pour son désert de sel et ses lagunes étonnantes. Passée la déception d’un voyage en bus de 9 heures en compagnie de chauffeurs pingres et mal aimables, nous débarquons sous un soleil de plomb à la recherche du camping Las Buenas Peras et atterrissons finalement au camping Los Perales, histoire de rester dans le même champ lexical et de fuir la chambre non avenante offerte par une Lilloise dépressive, qui conclura notre discussion par un « Prefieren el camping » monotone et mémorable.
Nous croiserons d’ailleurs plusieurs Français installés là pour travailler dans le tourisme. D’innombrables agences proposent les mêmes expéditions aux alentours du village, nous sommes un peu perdus et devons accepter pour quelques jours d’endosser le rôle de touristes prêts à débourser des sommes importantes pour visiter les décors naturels qui nous entourent. Nous limiterons notre contribution au développement du tourisme de masse à une excursion et une location de vélo. Pour le reste nous nous débrouillerons avec nos propres jambes, quelques tomates et du bon pain.
La découverte de la Réserve nationale de flamants roses est incroyable : sur la lagune de Chaxa, les grands oiseaux sont à quelques mètres de nous, posant pour des photos de carte postale, tantôt sur une patte pour dormir, tantôt gigotant leurs échasses pour remuer les planctons (la danse flamenco viendrait-elle de là ?) mais surtout ne cessant de picorer les marais pour se nourrir. L’élégant flamant rose passe en effet pas moins de 16h par jour à manger.
Protégés par le majestueux volcan Licancabur et sa forme conique régulière, nous faisons route vers les lagunes de l’Altiplano, et le paysage est radicalement différent : nous y accédons à pied par un chemin enneigé, les sommets dessinent nettement leur contour blanc sur un ciel bleu azur, leur reflet dans la lagune crée un paysage idyllique. Nous resterions des heures assis face à ce décor peuplé ça et là de nos chères vigognes aux yeux de biche.
Le dernier jour de notre escapade chilienne sillonne la Valle de la Luna au rythme saccadé de nos VTT sur les chemins sableux et rocailleux. L’effort en vaut la peine, il est difficile de décrire les roches lunaires qui nous entourent, les dunes de sables formées par le vent, les grottes creusées dans la roche brillante de granit et de sel. Ici les éléments ont créé des courbes et des pics que Neil Armstrong n’a sans doute jamais approchés. Le coucher de soleil est tout simplement grandiose. Mais attention à la descente !! Nous aurons bien mérité notre énorme pizza de chez Barros, la musique jouée en live par quelques musiciens chiliens complétant à merveille le bonheur d’un bon repas au coin du feu après une journée en selle. Nous oublions vite que demain il faudra remonter dans ce satané bus au personnel antipathique.
Lagunas Miscanti - Reserve National Los Flamencos
Huma Huma Humahuaca*
Nous choisissons de quitter rapidement l’agitation perpétuelle et la circulation à haut débit qui anime Salta la linda, où les vigiles des musées collectionnent les pièces européennes ou alors nous suivent dans les différentes salles d’exposition pour essayer d’apprendre le français. Nos quelques jours ici nous permettent malgré tout d’en apprendre un peu plus sur les grandes dates qui donnent leur nom aux places principales de la ville (25 de Mayo : date officielle de l’indépendance de l’Argentine, démission du roi espagnol / 9 de julio : constitution du premier gouvernement argentin), de découvrir le goût des Argentins pour le sport (des appareils de musculation pointent leur nez à différentes « esquinas » du Cerro San Bernardo) et de goûter aux patates douces, aux churros et aux pâtisseries au dulce de leche tant prisé ici.
Les vélos vont rester quelque temps au deposito pour laisser la place aux quatre roues motorisées nous conduisant, « despacio, todo bueno », dans une boucle sinueuse vers le village de Iruya, perdu au milieu de montagnes dans les tons pastels, lisses comme des dos de mammouths gigantesques, en passant par les éblouissantes Salinas Grandes, pour finir abasourdis par les couleurs de la Quedrada de Humahuaca. Abasourdis, oreilles bouchées par plusieurs passages de col à 4000m, nous ne savons plus où donner de la tête en descendant dans la Garganta del diablo et en cheminant au milieu de la montagne aux sept couleurs. Des villages parsemés de petites maisons en adobe et en bois de cactus ponctuent deci-delà les paysages très variés que nous parcourons, les ouvriers des Salinas Grandes nous aident à pousser la voiture en panne de batterie après un petit déjeuner glacial réchauffé par une musique d’autoradio enjouée et un lever de soleil tranquille, les duenos portent des chapeaux cloches adorables, les vigognes s’élancent pour traverser devant nous d’un pas élégant et la terrasse de la Asunta nous invite à quelques postures de yoga bénéfiques pour nos épaules de voyageurs, tassées par les routes rocailleuses.
Le clou de notre petit séjour au Nord andin de Salta porte le doux nom de « Parilla », nous improvisons en effet un barbecue impresionante à base de légumes et de morceaux de bœufs délicieux, le tout arrosé d’un Cabernet Sauvignon argentin increible pour finir par des bananes au dulce de leche. Un vrai festin au camping de Tilcara, nos papilles gustatives sont en émoi, à quand la prochaine parilla ??
* à chanter avec une grosse voix pour la danse du feu
** Mouvement chez les mollets moteurs : provisoirement nos articles sont rédigés par Sophie
On file dans la Quebrada
Après le passage de la frontière argentine, s’étend l’immense Quebrada de Humahuaca. Cette belle vallée aux couleurs et formes façonnées par les vents offre un paysage incroyable. On ferme les yeux et on essaye d’imaginer ce qui a pu se passer ici il y a des milliers d’années, au temps des éruptions volcaniques et des coulées de laves qui ont gravées à jamais leur passage. Plus que partout ailleurs sur la Cordillère des Andes, on imagine ici des chocs brutaux, des éclatements de plaques tectoniques, du feu et des cendres. On ouvre les yeux et le résultat est aujourd’hui un paysage paisible, coloré, brut qui offre une contemplation sans pareil.
Nous plantons la tente au bord de la route, dans des forêts de cactus, chez des argentins, le temps de partager avec eux le repas de fête de la Pachamama (tripes et pieds de vaches marinés dans une sauce tomate relevée).
Nous réalisons nos premiers pas en Argentine, tantôt déçus de ce que nous trouvons, tantôt étonnés, souvent ravis. Le contraste avec la Bolivie est immédiat. Une fois la frontière passée, l’accent fait des « che » à chaque mot, les thermos sont remplis d’eau bouillante et le maté tourne, les balayeurs sont mieux équipés qu’Inspecteur Gadget, les petites boutiques ont des portes et des frigos. Nous replongeons tranquillement dans un monde un peu plus connu mais qui heureusement nous offre encore des surprises.
Nous faisons paisiblement notre entrée dans la ville Salta par une piste cyclable et nous attendons notre amie Sophie qui nous rejoint dans quelques jours, bercés dans le rythme de vie argentin.